vendredi 23 mai 2008

Serra en son temple d’acier


Au départ, on se demande où sont les oeuvres. La nef du Grand palais semble exceptionnellement vide au premier coup d’oeil. C’est alors qu’apparaissent sous les yeux du spectateur cinq grandes plaques d’acier verticales disposées à intervalles réguliers dans toute la longueur de la salle.
L’oeuvre de Richard Serra, expressément réalisée pour le monument parisien dans le cadre de l’exposition « Monumenta », en laisse plus d’un perplexe.
Loin des expositions classiques, ici, le visiteur déambule, observe, photographie, s’approche, recule. L’installation l’invite à la « Promenade », d’où son nom.
Ce qui frappe en premier, c’est la légère inclinaison des totems d’acier, qui offrent une « redéfinition sculpturale de l’espace », selon l’artiste.
Poussé par la curiosité, et conscient de vouloir remplir tout ce vide, le visiteur cherche un sens. Certains d’entre eux palpent, auscultent, caressent, ou encore cognent l’une des plaques.
Pourtant, en elles-mêmes, celles-ci n’ont aucun sens. « Il n’y a de contenu ni dans les plaques, ni dans l’acier, ni dans le rythme des cinq plaques », affirme Richard Serra.
En résumé, c’est le visiteur qui fait l’art. Il vit une expérience privée dans un espace public. « Ça pourrait pratiquement être une gare », affirme le sculpteur américain.
Selon ses propres termes, l’artiste transforme la salle d’exposition en « récipient ». Il s’appuie sur l’architecture du lieu pour créer un dialogue avec ses oeuvres imposantes. Le contraste est fort entre l’apparente dureté de la matière brute et les volutes sculptées du décor que constitue la voûte céleste du Grand Palais.
Le rendu est presque mystique, les pauses entre les intervalles pouvant s’apparenter à une procession rituelle. D’ailleurs, Serra lui-même compare son oeuvre à Stonehenge, ce temple de pierre sans doute utilisé pour des rites funéraires.
La salle offre une autre perspective, où l’homme semble à nouveau dominer la matière. Du haut du grand escalier, les plaques ressemblent à de simples feuilles de papier posées sur le sol comme par magie. « Reconfigurer l’espace, le voir à sa façon, le repenser », c’est tout le but de l’oeuvre de Richard Serra.

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